Dossier Technique :
Maitrise d’ouvrage, organisation de l’oeuvre…
L’ouvrage d’art désigne une construction unique, nécessitant de faire appel non seulement à des ouvriers pour sa réalisation, mais aussi à des techniciens « de l’art » étant capables de concevoir un ouvrage adapté aux
contraintes du projet. La définition des ouvrages courants ou non-courants est sujette à interprétation1, mais dans le domaine ferroviaire cette précision est moins dimensionnante sur le processus projet que les contraintes de réalisation.
Zones urbaines et trafic hyperdense
Lorsque la disponibilité de l’infrastructure est en jeu, le réseau ferroviaire est l’environnement le plus exigeant pour les ouvragistes. Plusieurs études démontrent que le report du trafic ferroviaire est difficile à modéliser2, voire parfois impossible à réaliser. Les itinéraires de contournement sont difficiles à mettre en oeuvre. Sur certaines lignes notamment en Ile -de-France, l’affluence est telle que les moyens de substitution tels que les bus ou les tramways, quel que soit leur nombre, ne peuvent pas se substituer au trafic ferroviaire.
En conséquence il s’avère nécessaire de réserver des plages horaires qui seront dédiées aux travaux. Cela a un cout pour l’exploitant ferroviaire. La quantité et la durée de ces plages font l’objet d’âpres négociations, et sont finalement souvent réduites au strict nécessaire.
Une des problématiques des projets ferroviaires est liée aux accès. En effet le réseau ferré n’est desservi que ponctuellement par des infrastructures routières, elles-mêmes pas toujours adaptées au cheminement d’engins lourds. En zone rurale, il est parfois nécessaire de réaliser une route pour les seuls besoins des travaux. Les zones de trafic hyperdense sont la plupart du temps aussi fortement urbanisées. Le bâti environnant restreint à la fois les accès et les moyens de mise en place (installations de chantier, grues…). Les contraintes alors se démultiplient et il devient indispensable de maîtriser simultanément la conception, les méthodes et la planification d’un projet d’ouvrage d’art pour le mener à bien.
Des contraintes inhérentes à l’ouvrage…
L’obstacle à franchir et la voie supportée imposent des dimensions fonctionnelles : une étude préliminaire établira qu’un pont routier aura une portée de 60 mètres, que 20 mètres de largeur seront nécessaires pour 4 voies et 2 trottoirs, qu’il sera équipé en rives de protections prévenant les chutes de véhicules, d’éclairage, d’assainissement… Sur la base de ces fonctionnalités, le processus d’études type loi MOP permet de préciser progressivement les caractéristiques techniques de l’ouvrage.
Le processus projet va pouvoir transformer les contraintes fonctionnelles en contraintes structurelles. Dès les études amont, le biais, les profils en long et en travers de l’ouvrage sont arrêtés. Les matériaux de construction sont choisis et sont révélateurs de l’approche du concepteur.
Le métal présente des avantages en termes de fiabilité et de maîtrise des risques. Il est léger et peut être mis en place rapidement. La fabrication atteint une précision inégalée par la plupart des ouvrages béton, et un assemblage « à blanc » en usine permet d’éviter beaucoup d’aléas sur site. Le béton quant à lui peut être précontraint, coulé en place ou préfabriqué. Il présente l’avantage d’une grande résistance à la compression et une bonne stabilité. Afin de tirer les bénéfices de chaque matériau, on réalise souvent aujourd’hui des ouvrages mixtes : le tablier béton repose alors sur une charpente métallique multipoutres.
… aux méthodes de pose
Le choix des matériaux de construction sont intimement liés à la méthode de mise en place. De nombreux modèles d’ouvrages sont d’ailleurs désignés par cette méthode. Pour un pont à poutres et parmi les différentes options de pose envisageables, citons les plus courantes :
- La construction en place
- Le lançage
- La mise en place par éléments
La construction d’un ouvrage en place n’est possible qu’en site propre, c’est-à-dire avec des contraintes extérieures minimales.
En construction ferroviaire, c’est le cas pour des voies (traversée et traversante) 100% nouvelles, c’est-à-dire 1% des projets.
Le lançage consiste à préfabriquer l’ouvrage, puis à le déplacer jusqu’à sa position définitive (ripage transversal, longitudinal ou par rotation). Cela présente l’avantage de fortement limiter les temps d’interruption de trafic. Les principaux inconvénients
sont la nécessité d’une plateforme de préfabrication à proximité immédiate du chantier, et la limitation des accès par l’environnement. Il en résulte généralement des phasages complexes, des ouvrages provisoires plus nombreux (berlinoises, étaiements, palées, tabliers auxiliaires…) et des moyens importants pour déplacer l’ouvrage.
La mise en place peut être réalisée par des dispositifs variés. Les plus courants comprennent le grutage (grue de forte capacité, fixe ou mobile), le poussage/tirage (par vérins ou véhicules roulants) et le portage (remorque modulaire autopropulsée ou SPMT, type Kamag). Ces moyens exceptionnels sont couteux, la méthode doit donc être extrêmement bien ficelée.
Si le lançage est attrayant, il présente néanmoins des risques : la conception doit prévoir tous les détails de raccordement avec l’existant, le cheminement de l’ouvrage préfabriqué doit être parfaitement préparé, la météo peut remettre en cause les opérations… car le planning prévoit généralement une opération « coup de poing » unique. Le projet devient donc très sensible aux aléas.
L’alternative la plus couramment retenue est la mise en place par éléments, généralement à la grue. Cette dernière doit pouvoir accéder au chantier. Le montage de tronçons sur site peut limiter les temps d’intervention, le soudage en place et les phases provisoires. A l’heure où les temps d’intervention sont prépondérants pour impacter le moins possible l’exploitation des voies, c’est la méthode la plus avantageuse par sa simplicité, sa souplesse et sa rapidité d’action.
Il est ainsi possible d’interrompre la circulation des voies moins longtemps. Les plages travaux sont intercalées plus aisément dans le trafic. Il en résulte une plus grande souplesse de planning, et un abaissement de la criticité des risques du projet.
Repris dans le Bulletin N° 288 de Juillet-Août 2015, vous trouverez ci-après le lien vers le dossier complet.
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