Fabrication de rails à HAYANGE
La saga de la sidérurgie Française
Un peu d’histoire…
Il faut remonter à l’époque Celtes pour trouver des traces de minerais de fer dans le secteur Mosellan, mais c’est depuis l’époque romaine que le fer est réellement exploité sur le territoire hayangeois (au nord de Metz). Les premières traces écrites de l’existence d’une mine datent du 12ème siècle avec comme premier propriétaire Thierry de Hayange. En 1704, avec l’installation de Jean-Martin Wendel à Hayange, l’exploitation du minerai de fer passe du stade artisanal à celui de l’industrie sidérurgique. C’est déjà une innovation pour l’époque, Ignace de Wendel, expérimente la première coulée de fonte en utilisant le coke au lieu du charbon de bois. La première fabrication de rails remonte à 1840, un chemin de fer à traction animale et à voie étroite qui reliait Hayange à la Moselle. Après un voyage en Ecosse, François de Wendel introduit les méthodes anglaises : affinage de la fonte à la houille, four à puddler, machines à vapeur et laminoirs mécaniques. Ses successeurs continuèrent à intégrer les dernières innovations techniques et la région devient le fer de lance de la production de la métallurgie française. Au 19ème siècle, l'usine ne cesse de grandir et d’innover. En 1867, devant l'augmentation du trafic ferroviaire, de Wendel se voit offrir le privilège de poser une voie privée le long de la ligne de l'Est , le chemin de fer de Wendel est né.
Après la seconde guerre mondiale, le plan MONNET, "plan d'ensemble pour la modernisation et l'équipement économique" fixe notamment la production d'acier et marque la première intervention de l'Etat dans le domaine sidérurgique. Ainsi, toujours sous la propriété de Wendel, en fusionnant plusieurs entreprises, la coopérative SOLLAC est créée en 1948 (Société Lorraine de Laminage Continu).
- 1704 – 1948 : la famille Wendel est propriétaire du site d’Hayange
- 1948 – 1972 : le site d’ Hayange dépend de la coopérative « SOLLAC »
En 1972, suite à des fusions et acquisitions, le groupe partage son capital avec USINOR (Union sidérurgique du nord de la France). L’usine continue de prospérer, et en 1979, l’entreprise réalise une 1ère mondiale : une coulée continue à brames (ultime avancée en matière de coulée continue de produits plats avec un format au plus près de la forme finale). Mais avec la fin des trente glorieuses et la crise du pétrole, les premières difficultés économiques apparaissent. En 1981, François Mitterrand nationalise la sidérurgie, dont USINOR. En 1986, toujours avec l’aide de l’état Français, USINOR fusionne avec son concurrent, le lorrain SACILOR, pour devenir un grand groupe nationalisé USINOR – SACILOR à taille Européenne.
- 1972 : la coopérative « SOLLAC » devient « USINOR »
- 1981 - 1986 : USINOR est un groupe sidérurgique national.
- 1986 - 1996 : USINOR devient USINOR – SACILOR un grand groupe sidérurgique national
En 1997, USINOR et SACILOR, historiquement rivaux, sont accusés de ne pas avoir su rationaliser l'appareil industriel, l’état Français intervient, le gouvernement Juppé engage une action de privatisation d’USINOR – SACILOR, ce qui va lui permettre d'apurer les dettes du groupe. USINOR-SACILOR redevient USINOR, une entreprise complètement restructurée.
- 1997 : USINOR est privatisé
A partir des année 2000, la concurrence mondiale est rude, les groupes ennemis Allemands Krüpp et Anglais British Steel grossissent à force d’acquisitions et fusions. De l’autre côté de la Manche, le produit de la fusion de British Steel et d'Hoogovens génère le groupe "CORUS", (le choix de ce nom est symbolique : "Core" est le mot anglais qui signifie "noyau"). Ce groupe anglo-hollandais CORUS est tentaculaire et puissant, (14,6 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 66.000 salariés) il occupe des positions fortes dans l'automobile et la construction, de surcroit, il entend aussi préserver son leadership dans l'industrie ferroviaire et rachète SOGERAIL, la filiale de fabrication de rails d’USINOR installée à Hayange. Ce site porte désormais le nom de CORUS-RAIL. Malgré les difficultés économique des années 2000, la production de rails de la filiale CORUS-RAIL est forte, elle produit des rails destinés au monde entier avec le développement Européen des lignes à grande vitesse.
- 1999 : le site d’Hayange devient CORUS RAIL, filiale du groupe anglo-hollandais CORUS
Trois ans après la fusion de British Steel avec le hollandais Hoogovens, la courte histoire de CORUS tourne à la catastrophe. Le sidérurgiste britannique annonce dès 2002 une perte record de 676 millions d'euros, mais CORUS-RAIL possède un carnet de commande bien rempli, avec notamment la fourniture des lignes à grande vitesse Françaises et Européennes, les métros et les tramways. Mais si CORUS-RAIL assure une production très élevée, les dettes s’accumulent. Un groupe Indien nommé Tata, un « géant » qui emploie près de 450 000 salariés dans le monde s’intéresse à ce secteur. L'anglo-néerlandais CORUS accepte une offre de rachat de Tata Steel comme porte de sortie d'une longue crise, de plus, le prix de rachat de 10,6 milliards d'euros intègre la reprise de la dette de CORUS. Le futur géant sidérurgique devient le cinquième aciériste mondial. Par ailleurs, tout laisse penser que Tata Steel apportera une plus-value car il dispose d'importantes mines en Inde et la matière première est de plus en plus chère sur le marché mondiale. Ce rachat illustre la montée en puissance des groupes industriels des grands pays émergents, Inde, Brésil, Russie et Chine, aux dépens des puissances traditionnelles du vieux continent.
- 2007 : CORUS RAIL devient CORUS RAIL, filiale de Tata Seel
Immédiatement, après ce mariage, Tata Steel décroche un premier contrat avec Réseau Ferré de France (RFF), pour le chantier du TGV-Est. Tata Steel connait une période fast, en décembre 2009, le groupe annonce un investissement de 35 millions d'euros de sa holding sur son laminoir de Hayange, visant d'une part à améliorer la productivité et d'autre part à mettre en place des technologies nouvelles pour produire des rails de 108 mètres de long contre 80 mètres au part avant. Il va permettre de porter la production annuelle de 300.000 à 340.000 tonnes. Ce programme a été décidé après la confirmation de la signature d'un contrat d'environ 350 millions d'euros pour la fourniture de rails à la SNCF.
A partir de 2010, la sidérurgie britannique va mal à cause de la crise des subprimes . Face à ces difficultés économiques, Tata Steel souhaite se désengager de ses activités britanniques, et du site d’Hayange par la même occasion. Cette annonce fait l’effet d’un coup de tonnerre en France et entraîne une pluie de critiques. Une nouvelle phase d'incertitude débute pour les salariés d'Hayange. A partir de 2015, le sidérurgiste indien se rapproche d'un fond d'investissement britannique, Greybull, spécialisé dans la reprise d’entreprise en difficulté. En 2016, Le conglomérat industriel Indien signe un accord avec ce fond d'investissement, l'accord porte sur plusieurs usines britanniques, dont le site d'Hayange en Moselle. Ce nouveau groupe reprend le nom d'une ancienne entreprise outre-Manche : British Steel, le site d’Hyange prend le nom de France Rail Indsutry.
ì 2016 Tata Steel devient British Steel, filiale du fond d'investissement britannique Greybull
En 2019, soit trois ans plus tard, c'est la faillite de British Steel ! le Brexit est directement à l’origine de cet effondrement. Le chinois Jingye reprend le groupe britannique, mais sans France Rail Indsutry, en effet le gouvernement Français met son nez dans cette faillite et s'oppose à cette reprise, souhaitant un repreneur français ou européen. Le site d’Hayange, quasiment 18 moi sans actionnaires, suscite les convoitises du monde entier car son carnet de commande est plein grâce aux commandes des principaux réseaux ferrés européens. En 2020, un milliardaire Anglais aux origines indiennes, Sanjeev Gupta, qui emploie plus de 35 000 salariés dans 300 sites répartis dans une trentaine de pays s’intéresse au site d’Hayange. Face à d’autres repreneurs, l’offre de Sanjeev Gupta est préférée par l’Etat français car le groupe a accepté de tirer une grosse épine du pied du Ministre de l’Industrie, Bruno Lemaire, en achetant également l’ancienne aciérie Ascoval de Saint-Saulve dans le Nord, qui n’avait pratiquement plus de débouchés. Pour le gouvernement français, l’opération a tout d’un mariage heureux : Saint-Saulve (ASCOVAL) fournit des blooms (les demi-produits du rail) à Hayange (Liberty Steel) qui les transforme en rails.
Repris dans le Bulletin N° 301 de Janvier-Février 2022, vous trouverez ci-après le lien vers le dossier complet.
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