Le GNR : Gazole Non routier

GNR logoDossier Techniques & nouveautés :

Il faut remonter au protocole de Kyoto qui imposait de réduire de 20% les émissions polluantes, pour comprendre que le fioul, et sa haute teneur en soufre allait rapidement provoquer une madérisation du produit.
Sa couleur est rouge, son arôme est très relevé, mais pour savoir ce qu’il donne en bouche, il faudra demander à un moteur. Arrivé au 1 novembre 2011, il ne s’agit pas du Beaujolais nouveau, mais du GAZOLE NON ROUTIER.
Le GNR est donc un nouveau carburant de traction destiné à un usage professionnel sur les engins mobiles non routiers type travaux publics, forestiers ou agricoles dont la puissance est supérieure à 18 KW, Les locomotives et autres engins ferroviaires de traction (bourreuses, draisines, engins rail/routes…) viennent également s’ajouter à cette liste.

Tristan BACHELARD de l’InfraLOG ALPES s’est proposé pour réaliser cet article consacré au GNR pour vous faire découvrir cette nouveauté.

Un peu de chimie….

Avec un indice de cétane plus élevé à 51 contre 40 pour le fioul permet une meilleure combustion du carburant et une diminution des éléments imbrûlés, ces fameuses particules polluantes et autres impuretés présentes dans les gaz d’échappement. De plus, une teneur en soufre moins élevée favorise d’une part la diminution de gaz à effet de serre, notamment les oxydes d’azote (NOx) et d’autre part la réduction de particules polluantes : 10 ppm (10 mg/kg) contre 1000 ppm actuellement soit 100 fois moins élevée que le fioul actuel.

Mais comment remplacer la propriété lubrifiante du soufre qui augmente de façon non négligeable la vie des moteurs ? Tout simplement en intégrant un biocarburant de source renouvelable à hauteur de 7% maximum, l’Ester Méthylique d’Acide Gras (E.M.A.G).

Seulement cette molécule possède des propriétés tensioactives, ce qui provoque, comme un produit détergeant, le détachement et la mise en suspension les dépôts accumulés sur les parois des cuves. Entrainés vers les filtres et les systèmes d’injection, ces derniers peuvent créer des encrassements sévères au risque de causer des dommages importants comme le colmatage des filtres et la dégradation des pompes et moteurs.

Mais ce n’est pas tout, les EMAG possèdent également des propriétés hydrophiles, c’est à dire qu’elles ont tendance à retenir l’eau (elle-même responsable de l’apparition de bactéries et micro-organismes, autre source de colmatage des filtres).

Enfin, comme tout ester, la tenue au froid est limitée (O°) ce qui obligera les pétroliers à ajouter des adjuvants.

Pour clore le tableau, les EMAG possèdent une sensibilité non négligeable à l’oxydation, et ne permettent pas un stockage supérieur à 6 mois.

Alors pourquoi cet acharnement aux Ester Méthylique d’Acide Gras (E.M.A.G)

Il faut savoir que l’ajout d’ester Méthylique d’Acide Gras (E.M.A.G) dans les carburants diesel a pour origine la volonté des gouvernements de l’Union Européenne de mettre une part de carburant issu de la biomasse dans le carburant d’origine pétrolière.

Pour contrer tous ces inconvénients, les grands groupes pétroliers comme TOTAL ne manquent pas d’idées, et proposent des parades via des adjuvants et autres additifs. On trouve donc sur le marché des GNR précédés de noms aguichants comme « prémium », « extrénum …poudre de perlimpinpin qui permet en partie de résoudre le problème de tenue au froid, mais qui n’enraye pas l’action détergeante des EMAG.

Beaucoup d’inconvénients, alors que faire….

 

Avant le passage au GNR, il faut prévoir un nettoyage de la cuve ou du réservoir, ainsi qu’un remplacement des filtres. Dès le passage au GNR, le remplacement des filtres devra se faire à intervalle plus court que les données constructeur.

Concernant les périodes de remisage des engins, prévoir une purge des réservoirs. Lors de la remise en service, procéder à une purge du réservoir afin d’éliminer la présence d’eau provenant de la condensation.

Pour passer un hiver tranquille, il faudra demander du «GNR « Hiver » à votre fournisseur, moyennant quelque centimes de plus.

 

Vraiment que des inconvénients….

Jusqu’à maintenant, les engins non routiers concernés par le GNR ne possédaient pas de dispositifs de dépollution comme des pots catalytiques car le soufre altère tous ces systèmes. Donc le passage au GNR va permettre aux constructeurs d’équiper leurs engins de dispositifs dépolluants, ce qui rendra les engins de chantiers encore plus propres.

 

Les évolutions du GNR…

 Le bio n’a pas que du bon, c’est bel et bien l’Ester Méthylique d’Acide Gras, qui cause tous ces problèmes. Si tous ces désagréments ne dérangent pas les grands groupes de travaux publics de dépenser à foison en nettoyage de cuves et remplacements de filtres, le monde agricole et viticole est quant à lui pénalisé, tracteurs et moissonneuses dormant 6 mois de l’année. Pour un agriculteur, un sou est un sou, donc pas question de remplacer plus souvent les filtres ou de faire nettoyer sa cuve par un professionnel. C’est pourquoi les petites sociétés pétrolières proches du monde paysan se sont penchées sur la confection d’un GNR sans EMAG appelé « GNR BIO FREE ». Ce carburant respecte intégralement la norme EN-590 du GNR. Ce GNR BIO FREE ne contient pas de biocarburant, donc :

· Pas d’obligation de nettoyer ou changer la citerne,

· Pas besoin de vidanger les réservoirs de vos engins,

· Pas d’encrassement des filtres,

· Pas besoin d’ajouter des additifs,

· Meilleure protection des injecteurs,

· Un produit stable (pas de limite dans le temps),

· Une résistance naturelle au froid jusqu’à -10°.

Deux sociétés se distinguent dans le « GNR BIO FREE » :

1. DYNEFF, filiale du Groupe Rompetrol avec son « GNR ZERO »

2. GROUPE VALLIER avec son GNR ECOPOLAIRE.

Certes, cela paraît séduisant, mais la chaîne logistique actuelle en France ne permet pas de mettre facilement à disposition de tous un GNR sans biocarburant sur l’ensemble du territoire. De plus, très peu de distributeurs ont décidé d’opter pour du GNR sans biocarburant, du fait des investissements nécessaires et de l’incitation forte des pouvoirs publics à l’incorporation des biocarburants.

Pour conclure…

On constate donc un clivage entre d‘une part les grands groupes pétroliers qui préfèrent ajouter un carburant de biomasse au GNR afin de respecter les désirs du gouvernement tout en proposant des additifs dont l’effet se fera plus sentir sur notre porte-monnaie que dans le moteur, et d’autre part les groupes pétroliers de moyenne importance qui se soucient des filtres et pompes à injection, donc de notre porte-monnaie, en confectionnant un GNR qui contourne la loi tout en la respectant.

L’arrivée de ce nouveau carburant suscite donc de nombreuses questions et inquiétudes. Avec moins de 6 mois de recul seulement, le feuilleton du GNR n’est pas terminé.


Repris dans le Bulletin N° 281 de Janvier-Février 2012, vous trouverez ci-après le lien vers le dossier complet.


Cet article fait partie de la série d’articles techniques ou dossiers importants extraits des archives du Bulletin National qui vous sont proposés dans notre blogothèque réservées aux membres de l’ACTIF.

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